Ce vendredi 27 mars 2020, les fédérations professionnelles funéraires, Union du Pôle Funéraire Public, Fédération Française des Pompes Funèbres et Confédération des Professionnels du Funéraire et de la Marbrerie, représentées par Manuel SAUVEPLANEprésident de l’UPFP, Alain HOFFARTH et Roger SCHVARTSMAN co-président de la FFPF, Michel MARCHETTI et Didier KAHLOUCHE, co-président de la CPFM, afin de réagir à la publication de l'avis du Haut Conseil de la santé publique relatif à "la prise en charge du corps d’un patient cas probable ou confirmé COVID-19"
Copie du courrier :
M. Edouard Philippe Premier Ministre Hôtel Matignon
57 rue de Varenne 75700 Paris
Paris, le 27 mars 2020
Objet : Secteur Funéraire - application de l’avis du HCSP relatif à la prise en charge du corps d’un patient cas probable ou confirmé COVID-19
Monsieur le Premier Ministre,
Nous tenons tout d’abord, au nom des trois fédérations professionnelles que nous représentons, à vous faire part de l’extrême mobilisation de l’ensemble de la filière funéraire, du dévouement et de la solidarité qui animent nos professionnels pour faire face à cette situation inédite, pour assurer notre mission de service public.
Les opérateurs funéraires ont pris connaissance de l’avis du Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP) en date du 24 mars 2020 relatif à « la prise en charge du corps d’un patient cas probable ou confirmé COVID-19 ».
Les retours qui nous parviennent de l’ensemble de la profession, acteurs publics ou privés, sont unanimes : cet avis est inapplicable en l’état ; il nécessite d’être modifié pour assurer la continuité du service public funéraire, et ce pendant la durée de cette crise sanitaire sans précédent.
Sans mettre en cause les compétences des experts qui composent le HCSP, nous sommes à leur disposition en tant que professionnels du funéraire, membres du CNOF (Conseil National des Opérations Funéraires), pour adapter au mieux leurs recommandations aux réalités de notre quotidien.
L’ensemble de la profession a partagé et appliqué la recommandation initiale émise par le HCSP le 18 février, visant à ce que « le corps soit déposé en cercueil simple, répondant aux caractéristiques définies à l’article R.2213-25 du CGCT et qu’il soit procédé sans délai à la fermeture définitive du cercueil », s’agissant des personnes suspectées ou avérées atteintes du Covid-19.
Sur le plan pratique, le médecin, en cochant sur le certificat de décès « Oui » pour « obligation de mise en bière immédiate en cercueil simple » et « obstacle aux soins de conservation » informait par ce biais les opérateurs funéraires des précautions particulières à respecter.
Les familles ont compris et accepté avec beaucoup de résilience les exigences sanitaires dictées par la situation épidémique actuelle.
Alors que les contraintes se renforcent de toute part pour lutter contre l’épidémie, la suppression de cette obligation n’est pas compréhensible. Elle est d’autant moins acceptable que, malgré la minoration délibérée du risque de contagion, l’avis indique que « la manipulation d’un corps peut exposer le personnel le manipulant à des germes à transmission aérienne ».
Le nouvel avis du HCSP autorise la pratique d’opérations funéraires jusque-là interdites (transport de corps avant mise en bière vers une chambre funéraire, toilettes funéraires et/ou rituelles, présentation du visage du défunt, etc.), en contradiction avec des principes élémentaires d’hygiène et de sécurité.
Les manipulations successives (brancardage, introduction en cellule réfrigérée, pratique d’une toilette dans le laboratoire, exposition dans un salon funéraire dans une housse qui pourrait être ouverte pour voir le visage) sont autant de situations à risque auxquelles seront exposés nos personnels.
S’agissant spécifiquement des toilettes rituelles qui se pratiquent en « milieu humide » (cf avis HCSP), cet avis semble méconnaître la réalité de la pratique et du danger qu’elles présentent. Certaines pratiques conduisent à ce que la salle dédiée se trouve abondamment souillée par l’eau éclaboussée, la salle devenant alors potentiellement infectée.
Il en va de même s’agissant de la présence des proches autour du défunt au sein de la chambre funéraire. Il est illusoire, dans le contexte émotionnel d’un décès, de penser pouvoir y maintenir les gestes barrières minimums.
Nous observons, à ce titre, que depuis la diffusion de cet « avis », de nombreuses collectivités, ayant le pouvoir de Police des funérailles, prennent d’autres dispositions.
Par conséquent, après concertation avec nos adhérents et partenaires de la filière funéraire, nous demandons, lors de la prise en charge du corps d’un patient cas probable ou confirmé COVID-19 :
- Le maintien de l’obligation de « mise en bière immédiate en cercueil simple » ;
- L’interdiction de pratiquer une quelconque toilette, que le décès ait eu lieu en milieu hospitalier, en EHPAD, et a fortiori au domicile.
Nos trois Fédérations ont ainsi conjointement décidé de recommander à leurs adhérents de maintenir l’application de ces dispositions issues de l’avis du HCSP du 18 février 2020.
Les opérateurs funéraires sont parfaitement conscients de l’impact de telles mesures sur les familles qui, une fois encore, ont accepté avec beaucoup de compréhension ces mesures sanitaires exceptionnelles. Nos équipes sont, bien entendu et comme toujours, à l’entière disposition des familles endeuillées pour prendre en compte leurs demandes, par exemple en organisant ultérieurement une célébration et un temps de mémoire et réfléchir à des alternatives aux cérémonies funéraires telles que nous les connaissons.
Le respect de la « diversité des pratiques culturelles et sociales » auquel l’avis fait référence ne saurait se faire au détriment des mesures d’hygiène et de sécurité inhérentes à notre métier et à la « guerre sanitaire » à laquelle nous faisons face, rappelée par le Président de la République.
L’inquiétude légitime et grandissante des acteurs du funéraire s’expliquent notamment par le taux d’absentéisme élevé qu’ils observent.
Au-delà de la protection de notre personnel, la mise en cercueil immédiate permettra d’anticiper toute saturation des infrastructures funéraires liée à l’accroissement du nombre de décès, les cercueils pouvant être déposés dans des lieux mis à disposition par les collectivités (gymnase par exemple).
Permettez-nous de vous rappeler, une nouvelle fois, l’impérieuse nécessité de pouvoir accéder aux stocks stratégiques de masques à l’instar des autres acteurs du soin. L’avis du HCSP est très clair sur ce point : la prise en charge du corps d’un patient cas probable ou confirmé COVID-19 requiert des EPI. Il convient de s’y conformer pour le personnel funéraire comme pour l’ensemble de la chaîne sanitaire.
Notre démarche se veut constructive, au service de nos concitoyens, dans l’intérêt collectif et la volonté d’assurer la continuité de notre mission de service public essentielle à la Nation.
Nous nous tenons à votre disposition, ainsi qu’à celle de votre cabinet et de vos équipes, pour avancer en ce sens et permettre la continuité du service public funéraire.
Nous vous prions de croire, Monsieur le Premier Ministre, en l’assurance de notre haute considération.
Pour l’UPFP (Union du Pôle Funéraire Public)
Manuel SAUVEPLANE
Président
Pour la FFPF (Fédération Française des Pompes Funèbres)
Alain HOFFARTH Co-Président
Roger SCHVARTSMAN Co-Président
Pour la CPFM (Confédération des Professionnels du Funéraire et de la Marbrerie)
Michel MARCHETTI Co-Président
Didier KAHLOUCHE Co-Président
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