À l’heure où la pratique de la crémation va croissante, nombre de communes et autres collectivités se sont équipées d’appareils de crémation répondant tous aux normes en vigueur et tous équipés de filtration dernier cri. Dans le même temps, suite à la loi de janvier 2010, tous les crématoriums créés avant cette date doivent s’équiper d’une ligne de filtration d’ici février 2018. Tous font mine d’être de bons élèves, oui mais… Savent-ils toujours à qui ils ont à faire ?
Le développement de la crémation en France, qu’il soit purement sociétal ou lié au contexte économique, est un phénomène avéré. Aussi, nombre d’élus, pour le bien de leurs administrés et du fait de l’évolution de leurs pratiques, engagent des projets visant à la création d’un crématorium qui sera ultérieurement exploité, soit par une société d’économie mixte SEM, soit par un professionnel funéraire.
Parallèlement à cette «engouement» - puisque le législateur entend mettre en place un schéma d’implantation des crématoriums - les établissements créés, ante janvier 2010, doivent, quant à eux, s’équiper, avant 2018, d’une ligne de filtration leur permettant de répondre à la norme «Euro 5» relative aux rejets atmosphériques. Jusque-là, tout va bien… Enfin presque.
Pour parler franc, cette évolution des mœurs adossée à cette obligation réglementaire ont forcement éveillé moult convoitises chez certains, alors que, coté collectivités, récession oblige, l’étude des candidatures relève plus des soldes, que de l’examen attentif d’un dossier étayé de données et de tests concrets.
Attention, il ne faut pas voir le loup derrière chaque prestataire, là n’est pas le propos ! Mais il faut être très vigilant vis-à-vis de la multitude de fournisseurs qui ont fait leur apparition ces derniers temps dans le secteur de la crémation. Comme dans beaucoup d’autres secteurs, certains ne savent pas vraiment de quoi ils parlent et d’autres peuvent faire figure de vrais outsiders vis-à-vis des acteurs historiques qui font référence.
En effet, il est des entreprises qui ont pignon sur rue depuis des années et dont la maîtrise, le professionnalisme et le savoir-faire ne sont plus à remettre en cause… mais la qualité a un coût !
Lorsqu’une commune ou une collectivité se lance dans un projet de crématorium, il ne faut pas que les élus et autres personnes ayant la responsabilité d’établir le cahier des charges le fassent en catimini. D’autres, avant eux, ont déjà fait l’expérience et, pour certains, en ont fait les frais… Prenez contact, échangez avec eux. La réussite des uns et les déconvenus des autres sont une première source d’information à ne surtout pas négliger, tant du point de vue architectural que du point de vue technique. Justement, sur ce dernier point, si aucun de vos interlocuteur ne vous parle, ou a entendu parler d’un fournisseur qui vous fait les yeux doux et vous propose des tarifs ultra compétitifs… la naïveté n’a plus sa place !
Autre source d’information élémentaire s’il en est : les fabricants eux-mêmes !
Le fonctionnement et les aspects règlementaires relatifs aux équipements d’un crématorium vous sont parfaitement inconnus… Allez chercher l’information à sa source.
Par exemple, et beaucoup ne le savent pas, les fabricants d’équipements de crémation (four, filtration, etc.) procèdent régulièrement à des batteries de tests dont les résultats sont consignés et à la disposition de qui en fait la demande. Là encore, un fournisseur, un peu trop agressif, qui n’aurait aucune référence fiable et aucun résultat de tests à vous soumettre, devrait éveiller votre vigilance.
Il est également à noter que ces éléments peuvent s’avérer être très précieux lorsque, d’aventure, une association de riverains tente de compromettre un projet en s’appuyant sur des préjugés, des on-dit et, bien souvent, sur des données erronées.
In fine, en amont d’un projet, la bonne pratique, si bonne pratique il y a, serait de collecter un maximum d’informations, de rencontrer nombre d’exploitants et autres élus ayant déjà réalisé leur projet, visiter leurs installations si possible, afin de s’imprégner le plus possible de ce que doit être, objectivement, un crématorium ; avoir une vision et une connaissance globale des divers équipements, et ainsi pouvoir cibler précisément quels sont vos besoins et attentes vis-à-vis de votre futur projet. La création d’un crématorium ou la mise en conformité d’une installation existante représente somme toute un investissement relativement conséquent. De fait, il est primordial de bien connaître son sujet, de ne pas avoir la folie des grandeurs mais plutôt de coller aux besoins réels des administrés tout en anticipant, objectivement, les évolutions possibles à court et moyen termes… Le crématorium dit de proximité, par exemple, est un concept qui existe déjà depuis une dizaine d’années, renseignez-vous.
Une fois le cahier des charges établi en parfaite adéquation avec vos besoins et attentes, les choses sérieuses commencent avec l’étude des candidatures. Les équipements de crémation sont des investissements lourds qui s’amortissent sur plusieurs décennies. Leur seul tarif ne peut constituer un critère probant dans le choix final.
En effet, cette notion de temporalité est, pour ces appareils, synonyme d’entretien… Dans les propositions qui seront faites suite à l’appel à candidature, le service après-vente et le contrat de maintenance sont des postes sur lesquels il faut être très vigilant et ne pas hésiter, là encore, à glaner un maximum d’informations. Un vrai service de maintenance réactif, fiable et préformant justifie parfaitement un coût tarifaire plus élevé.
Depuis la fin des années soixante-dix et le démarrage de la crémation en France, combien ont fait l’erreur de choisir un prix en négligeant tous ces points cruciaux. Au bout du compte, ces installations ont couté deux ou trois fois plus cher. Lorsque l’on achète des lunettes ou une automobile, on est attentif à la qualité des verres ou aux options… Il en va de même pour un crématorium et pour ses équipements. Nul ne peut s’improviser fabricant de four ou expert en filtration du jour au lendemain… Ce sont des années de recherche et de développement qui font la qualité et la fiabilité d’un équipement, de même, ce sont des années d’expérience qui font les compétences d’un ingénieur et d’un technicien. Il faut bien garder à l’esprit, lors de l’examen des candidatures, que le prix ne fait pas tout et que le poste maintenance est d’une importance capitale.
Pour conclure, mais toujours dans le registre de la maintenance : Il faut suivre les préconisations du constructeur !
Bien souvent, une fois le crématorium en activité, la ligne de filtration en place et le personnel formé, l’erreur la plus fréquente est de vouloir faire des petites économies sur les produits et autres réactifs nécessaires au bon fonctionnement des équipements.
Une nouvelle fois, ATTENTION ! De telles pratiques peuvent toutes à la fois nuire au fonctionnement optimum de la ligne de filtration, l’encrasser et fausser de façon irrémédiable ses résultats lors des tests périodiques, provoquer une usure prématurée des éléments soumis à forte contrainte et, dans le pire des cas, impliquer un arrêt prolongé des appareils de crémations en tenant compte du risque que, si le fabricant identifie l’origine de la panne comme étant une mauvaise utilisation volontaire et prolongée, le contrat de maintenance devienne caduque et que les frais engagés soit à la charge du client. Là encore, les exemples ne manquent pas…
Pour l’élu local comme pour l’exploitant, un projet de crématorium ne doit ni être une ambition personnelle, ni un faire-valoir, mais bel et bien un équipement cohérent et fonctionnel au service des administrés. De même, il n’est pas nécessaire de faire un crématorium dans l’urgence ou au rabais, simplement pour être en mesure de répondre à une demande pressante.
Qu’il s’agisse d’un projet de crématorium ou d’une mise en conformité d’un équipement existant, il est, dans un cas comme dans l’autre, question d’investissements massifs. Ce sont des projets qui, malgré des pressions d’ordre sociétal et/ou règlementaire, doivent faire l’objet d’une vraie réflexion, tant en amont que lors du choix des prestataires qui réaliserons le projet.
Enfin, rien ne doit être laissé au hasard, lieu, architecture, équipement, exploitant, mais pensé en fonction d’un plan d’amortissement, des capacités de la collectivité et des besoins réels de ses administrés.
Bien à vous…
Steve La Richarderie
Résonance hors-série #1 - Spécial Crémation - Août 2015
Suivez-nous sur les réseaux sociaux :