Depuis que la loi modifiant les conditions minimales d’heures hebdomadaires pour les temps partiels est applicable, le contrat intermittent semble finalement l’arme juridique la plus adaptée pour que les opérateurs de pompes funèbres encadrent les contrats de porteurs. D’une part, car le contrat intermittent est considéré comme un contrat qui gère des activités qui sont par nature irrégulières, ce qui suppose qu’il soit impossible de demander une régularité de 24 heures hebdomadaires(1). D’autre part, car la Convention collective nationale des pompes funèbres autorise les opérateurs de la branche à pratiquer ce contrat(2), comme le prévoit la loi(3).
Ce contrat est donc plus adapté à la souplesse que demande le poste
Il est donc praticable sous couvert de respecter certaines dispositions conventionnelles. D’abord, il ne doit être proposé qu’aux salariés correspondant aux échelons 1.1, 1.2, 2.1 et 2.2. Il ne peut pas être proposé pour les échelons supérieurs. De plus, le contrat ne doit pas aller au-delà de 70 heures mensuelles.
Cependant, si l’idée du contrat intermittent est séduisante, la mécanique suppose malgré tout deux difficultés.
La première, émanant directement de la loi L. 3123-33, repose sur le fait que, pour être légalement valable, le contrat intermittent doit comporter dans sa rédaction certaines précisions sur la programmation du temps de travail du salarié. Celle-ci doit être anticipée. La difficulté réside alors dans le fait que l’opérateur de pompes funèbres doit, selon la loi, anticiper les interventions de son salarié en contrat intermittent, ce qui est souvent difficile, car, par essence, l’activité des opérateurs funéraires est imprévisible. Bien consciente que le secteur des pompes funèbres doit avoir un minimum de souplesse, la Convention collective nationale prévoit cependant, toujours dans son art. 10, la chose suivante :
"Une durée minimale annuelle de travail sera fixée avec chaque salarié, ainsi qu'une programmation qui ne pourra qu'être indicative compte tenu de la difficulté de planifier à l'avance l'activité des entreprises de pompes funèbres."
De fait, si le contrat doit comporter une partie programmatique, la Convention collective admet une marge d’erreur, du fait que les mentions sur le contrat ne sont qu’indicatives et peuvent ne pas être scrupuleusement respectées.
La seconde repose sur la prise en compte ou non des heures supplémentaires
Cette idée découle directement du premier point que nous venons de voir, car s’il est difficile de planifier le travail d’un porteur, il est donc difficile de prévoir dans quelle mesure il ne sera pas en dépassement de son taux horaire mensuel. Or, le reflexe classique voudrait que, pour toutes les heures en dépassement sur le mois, le salarié ait donc réalisé des heures supplémentaires. Cependant, si le secteur des pompes funèbres fait souvent l’objet, à travers la Convention collective nationale, d’aménagement du droit commun pour les raisons d’obligation de service, le cas des heures supplémentaires n’en connaît aucune.
Sur ce point, le juge de la Cour de cassation a rappelé à deux reprises durant ces quatre dernières années que les heures supplémentaires pour les contrats intermittents, bien que celui-ci puisse être lissé sur l’année, ne suppose pas de règle particulière en la matière. Ainsi, la règle applicable émane de l’art. L. 3121-22 du Code du travail, comme le rappelle la chambre sociale de la Cour dans son jugement rendu le 28 mai 2014(4). Cette règle suppose donc que les heures supplémentaires se calculent, dans le cadre d’un contrat intermittent, à la semaine et donc au-delà du nombre d’heures légales travaillées, à savoir 35 heures.
Kévin Roux
Juriste Le Vœu
Nota : (1) Art. L. 3123-31 du Code du travail. (2) Art. 10, chapitre II des accords du 16 février 2000 introduits dans la Convention collective nationale des pompes funèbres suite à la loi sur la réduction du temps de travail. (3) Art. L. 3123-31 du Code du travail. (4) Cass. soc. 28 mai 2014, no 13-12087 : "Mais attendu qu'il résulte des dispositions des articles L. 3123-31, L. 3123-33 et L. 3121-22 du Code du travail, que le contrat de travail intermittent ne constitue pas, en soi, une annualisation du temps de travail autorisant l'employeur à ne décompter les heures supplémentaires qu'au-delà de la durée annuelle légale ou conventionnelle ; qu'ainsi les heures supplémentaires doivent être décomptées, sauf exception légale ou conventionnelle, par semaine travaillée." |
Résonance n°110 - Mai 2015
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