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Cette fiche n° 1337 est issue du service documentaire "Pratique des opérations funéraires" des Éditions WEKA, supervisé par Marie-Christine Monfort, forte de 20 ans d’expérience dans le domaine funéraire au sein de la Ville de Lille et de la Métropole Européenne de Lille. Mis à jour en permanence, ce service offre une veille juridique et réglementaire, et des conseils opérationnels pour tous les professionnels pratiquant le droit funéraire.


La réduction ou la réunion de corps est envisagée lorsqu’une nouvelle inhumation est impossible dans une concession par manque de place. Il convient de définir la réduction et la réunion de corps. Doivent-elles obéir aux mêmes règles que l’exhumation ? Qui peut délivrer l’autorisation de réduction et de réunion de corps ? À compter de quel délai cette opération de réduction ou de réunion de corps peut-elle intervenir ?

Définir la réduction et la réunion de corps

• La réduction de corps est l’opération qui consiste à recueillir dans une boîte à ossements ou un reliquaire les restes mortels d’un seul corps.
• La réunion de corps, comme son nom l’indique, consiste à rassembler dans une même boîte à ossements les restes mortels d’au moins 2 défunts.
• La boîte à ossements est ensuite déposée soit dans la même sépulture, soit dans une autre.

Ces opérations ne peuvent avoir lieu qu’au terme du délai légal de rotation, qui est de 5 ans. C’est, selon les géologues, un délai minimal.

En tout état de cause, il s’applique (toutes les fois qu’un délai n’a pas été fixé) par :
• décret ;
• arrêté préfectoral ;
• délibération du conseil municipal ;
• autorisation préfectorale à l’occasion de l’autorisation de création ou d’agrandissement des cimetières.

Le recours à ces 2 interventions a le double avantage d’éviter des dépenses importantes aux familles, et de limiter la création de concessions dans le cimetière communal.

Définir le régime juridique de la réduction et de la réunion de corps

Aucun texte ne réglementant les opérations de réduction et de réunion de corps, il revient au juge d’apporter une réponse au régime juridique de l’opération de réduction et de réunion de corps.

Si le Conseil d’État a jugé que n’était pas une exhumation le fait pour un fossoyeur municipal, ayant constaté la décomposition de cercueils, de procéder, à l’intérieur du caveau, au rassemblement des restes dans une boîte à ossements (CE, 11 déc. 1987, n° 72998), la chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 16 juin 2011 (n° 10-13580), a qualifié d’exhumation cette opération.

La réunion et la réduction de corps nécessitent donc l’autorisation du plus proche parent du ou des défunts prévue par l’art. R. 2213-40 du Code général des collectivités territoriales (CGCT), ainsi que celle du fondateur ou des ayants droit de la concession pour procéder à son ouverture. On peut imaginer les problèmes rencontrés dans le cas des familles recomposées…

À noter
S’il ne s’agit pas d’un revirement de jurisprudence, il est tout de même intéressant de prendre connaissance d’un jugement émanant du tribunal judiciaire de Paris qui, en date du 25 octobre 2023, a autorisé les responsables d’une congrégation à procéder à la réunion des restes mortels de religieuses afin de libérer de nouveaux emplacements. Le juge a considéré que la congrégation constituait le plus proche parent de ces défuntes.

 
Le ministre de l’Intérieur avait d’ailleurs adopté une position similaire en 1994.

Réponse à la question écrite Sénat n° 05187 du 10 mars 1994 concernant les opérations de réduction de corps dans les cimetières communaux

Selon le ministre de l’Intérieur : "Aucun texte spécifique ne réglemente l’opération de réduction de corps qui consiste à recueillir, à la suite d’une exhumation, les restes mortels dans une boîte à ossements pour la déposer dans la même sépulture. L’art. R. 361-17 du Code des communes [CGCT, art. R. 2213-42] dispose toutefois que "lorsque le cercueil est trouvé en bon état de conservation au moment de l’exhumation, il ne peut être ouvert que s’il s’est écoulé 5 ans après le décès.

Lorsque le cercueil est trouvé détérioré, le corps est placé dans un autre cercueil ou dans une boîte à ossements". De même, la réduction de corps est conditionnée par la délivrance de l’autorisation d’exhumation par le maire de la commune concernée, prévue à l’art. R. 361-15 du Code des communes [CGCT, art. R. 2213-40], à la demande du plus proche parent de la personne défunte qui justifie de son état civil, de son domicile et de la qualité en vertu de laquelle il formule sa demande.

Par ailleurs, le droit de superposition de corps ou "taxe" de seconde et ultérieures inhumations est perçu dans certaines communes à l’occasion de chaque inhumation autre que la première effectuée dans un terrain concédé dans la mesure où le règlement municipal fixant les tarifs des concessions funéraires prévoit expressément le paiement de ce droit. Sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux compétents, il n’apparaît pas possible en droit de percevoir à l’occasion d’une opération de réduction de corps un droit ou "taxe" de superposition de corps puisque en l’occurrence il n’y a pas de nouvelle inhumation dans la concession considérée."

 
Autoriser la réunion ou réduction de corps

Il est souhaitable que le maire soumette l’opération de réduction et de réunion de corps à autorisation préalable, même si aucun texte ne la réglemente. Cette disposition figurera utilement dans le règlement du cimetière. En effet, les seuls motifs de refus opposé par le maire sont le trouble au bon ordre, à la décence et la salubrité publique (pouvoirs de police) et le défaut de qualité du ou des demandeurs.

Aussi, il sera utile de préciser, dans votre règlement de cimetière, la possibilité ou non de recourir à ces opérations particulières et, le cas échéant, les conditions de leur réalisation. Cela permet de connaître exactement la composition du caveau. Les opérations de réduction ou de réunion de corps peuvent être pratiquées par des associations et entreprises habilitées.

Notre conseil
Pour un bon suivi des mouvements internes du caveau, il est conseillé d’inscrire sur le cercueil ou la boîte à ossements le nom des défunts si les corps réduits ou réunis sont identifiés. Cette précaution est d’ailleurs obligatoire depuis la loi de 2008.

Il est a priori difficile d’affirmer à une famille que ces opérations sont réalisables puisqu’elles dépendent de l’état des restes mortels, qui ne les autorise pas toujours… Une bonne information préalable est nécessaire.

 
Erreurs à éviter
Il faut savoir que la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures introduit des modifications importantes dans la surveillance des opérations funéraires.

Le nouvel art. L. 2213-14 du CGCT prescrit désormais la seule surveillance obligatoire de :
• la fermeture du cercueil et la pose de scellés quand le défunt est destiné à la crémation ;
• la fermeture du cercueil et la pose de scellés quand le corps est transporté hors de la commune de décès ou de dépôt et qu’aucun membre de la famille n’est présent lors de ces opérations.

Les exhumations à la demande des familles, à l’instar des exhumations administratives, ne donnent plus lieu à une surveillance obligatoire, ni au versement d’une vacation. Elles se déroulent sous la responsabilité exclusive de l’entreprise habilitée chargée de les réaliser. Il en est de même pour les opérations de réunion et de réduction de corps assimilées à une exhumation.

Ces nouvelles dispositions ne dispensent évidemment pas le maire de la commune où se déroule l’exhumation de l’exercice de son pouvoir de police. Ainsi cette opération doit-elle être réalisée dans le strict respect de l’ordre public, de la sécurité, de l’hygiène et de la salubrité.

Outre la famille demanderesse et l’opérateur funéraire, il est essentiel qu’un représentant de la commune (agent du cimetière, par exemple) assiste à l’opération ; cette présence garantissant la sérénité de son déroulement (imaginons que des bijoux soient trouvés sur le défunt…).

 
Le "casse-tête" des sépultures des congrégations

Nous trouvons dans de nombreux cimetières communaux d’anciennes sépultures de congrégations religieuses dans lesquelles reposent des défunts qui ont coupé toute relation avec leur famille. L’espace qui leur est dédié étant contraint, il n’est pas rare que le maire soit destinataire de demandes de réduction et/ou de réunion de corps émanant du chef spirituel de la congrégation afin de libérer un emplacement permettant de réaliser une nouvelle inhumation.

Dans une réponse publiée le 5 mars 2019 au Journal officiel du Sénat à la question écrite n° 14170, le ministre rappelle dans un premier temps que la réduction comme la réunion de corps est assimilée à une exhumation et que l’art. R. 2213-40 du CGCT s’applique quant aux conditions de sa réalisation. Évoquant plus particulièrement le cas des congrégations religieuses dont l’appartenance ne constitue pas un lien de parenté au sens du droit civil, il rappelle qu’une demande d’exhumation (ou de toute opération assimilée) émanant d’un représentant légal ne saurait être accordée.

Toutefois, nous apprenons à cette occasion qu’une réflexion est d’ores et déjà engagée entre les services ministériels concernés sur l’évolution de la notion de "plus proche parent".

FAQ

Que faire en cas de désaccord de la famille ?
Le juge judiciaire n’autorise jamais les réductions de corps ou réunions de corps dès lors qu’un membre de la famille s’y oppose. Si le caveau est plein, aucune nouvelle inhumation ne sera possible.

Références juridiques

• CGCT
• CE, 11 décembre 1987, n° 72998
• Cass. 1re civ., 16 juin 2011, n° 10-13580
• Rép. min. n° 14170 : JO Sénat du 5 mars 2019
• Rép. min. n° 05187 : JO Sénat du 14 avril 1994
• Tribunal judiciaire de Paris, 25 octobre 2023, n° 23/09952, Congrégation des petites sœurs de l’Assomption
 
Marie-Christine Monfort
Transmis par Claire Demunck
Directrice éditoriale, WEKA

Résonance n° 203 - Mai 2024

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