Aucune mesure de la baisse du taux de TVA aux opérations funéraires n’est actuellement envisagée.
Question écrite n° 101841
Question publiée au JO le : 03/01/2017 page : 22
Réponse publiée au JO le : 07/03/2017 page : 2095
Texte de la question
M. Jacques Dellerie attire l’attention de M. le ministre de l’Économie et des Finances sur le taux de TVA appliqué en France sur les frais d’obsèques. Les sept catégories d’opérations fixées par l’art. L. 2223-19 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), à savoir le transport des corps avant et après mise en bière, l’organisation des obsèques, les soins de conservation, la fourniture des housses, des cercueils et de leurs accessoires ainsi que des urnes cinéraires, la gestion et l’utilisation des chambres funéraires, la fourniture des corbillards et des voitures de deuil et enfin la fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à certaines exceptions près, relèvent d’une mission de service public.
Ces opérations sont imposées à la taxe sur la valeur ajoutée à taux normal, fixé à 20 % par l’art. 68 de la loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012. Pourtant, la plupart des États membres de l’Union européenne exonèrent de TVA les produits ou services funéraires, ou leur appliquent un taux réduit, comme le permet la directive 77/388/CEE du Conseil de l’Union européenne du 17 mai 1977 sur la TVA. Ces exonérations ou réductions de taux sont d’autant plus légitimes qu’elles s’appliquent à des dépenses incontournables.
Par ailleurs, lorsque la valeur des biens de la succession est insuffisante, les frais d’obsèques sont assimilés à une dette alimentaire. Ainsi, au sein de la famille du défunt, et même si elles ont renoncé à la succession, les descendants et les ascendants sont tenus au paiement de ces frais d’obsèques. Il s’ensuit que le taux réduit de TVA de 5,5 %, qui s’applique prioritairement aux produits alimentaires, est refusé à des frais assimilés à une dette alimentaire, alors que les billetteries de rencontres sportives bénéficient de ce taux réduit. Il s’en évince qu’une dépense légalement obligatoire se voit taxée à 20 % par l’État alors que d’autres dépenses facultatives ne sont taxées qu’à 5,5 %. Aussi lui demande-t-il quand le Gouvernement entend ramener une cohérence fiscale dans l’application des taux de TVA aux opérations funéraires.
Texte de la réponse
Selon les dispositions du point 16 de l’annexe III à la directive 2006/112/CE du Conseil de l’Union européenne du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), les États membres ont la possibilité, et non l’obligation, d’appliquer un taux réduit de TVA aux prestations fournies par les entreprises de pompes funèbres. Néanmoins, en parfaite conformité avec ces dispositions, la France n’applique le taux réduit de TVA de 10 % qu’aux seules prestations de transport de corps réalisées par des prestataires agréés au moyen de véhicules spécialement aménagés.
Une baisse de 20 % à 5,5 % du taux de TVA à l’ensemble des frais d’obsèques aurait un coût budgétaire de 280 M€ allant à rebours de l’objectif de redressement des finances publiques. En outre, cette perte budgétaire serait potentiellement sans effets sur le prix payé final supporté par le consommateur, les prix étant fixés librement par les opérateurs économiques de ce secteur et la dépense obligatoire. À cet égard, pour favoriser la concurrence au bénéfice d’un allègement du coût des obsèques, des mesures ont été prises visant à encadrer l’information du consommateur dans le secteur du funéraire. Ainsi, l’arrêté du 11 janvier 1999 relatif à l’information sur les prix des prestations funéraires impose aux entreprises de mettre leurs tarifs à la disposition de la clientèle, d’indiquer clairement le caractère obligatoire ou facultatif de chaque prestation ou fourniture susceptible d’être proposée et de fournir gratuitement un devis écrit et détaillé.
Cet arrêté a été renforcé en 2011 par une disposition qui prévoit l’utilisation obligatoire d’un modèle de devis type établi par arrêté du ministre chargé des Collectivités territoriales afin que les familles puissent comparer plus facilement les tarifs pratiqués pour l’organisation d’obsèques par les différents opérateurs. Ainsi, les devis doivent obligatoirement et clairement indiquer aux familles les prestations qui sont courantes en les distinguant de celles qui sont optionnelles ou effectuées pour le compte de tiers dans trois colonnes distinctes, prestations répertoriées dans l’une des 8 étapes des obsèques définies dans le modèle de devis.
Les services de la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF) procèdent régulièrement à des enquêtes afin de vérifier que la concurrence s’exerce normalement et que la réglementation relative à l’information du consommateur est correctement appliquée, notamment en matière de devis. Ainsi, depuis le début de l’année 2016, 169 entreprises funéraires ont fait l’objet de contrôles, qui ont donné lieu à l’établissement de 69 avertissements et 10 procès-verbaux. Ces contrôles seront maintenus au cours de l’année 2017.
Afin de prendre en compte la situation particulière de fragilité dans laquelle se trouve la famille du défunt, la loi n° 2013-672 du 26 juillet 2013 a par ailleurs introduit un art. L. 312-1-4 dans le Code monétaire et financier. Cet article permet à la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt d’obtenir, sur présentation de la facture des obsèques, le débit sur les comptes de paiement de ce dernier, dans la limite du solde créditeur de ces comptes bancaires, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des frais funéraires, dans la limite d’un montant fixé à 5 000 € par arrêté du ministre chargé de l’Économie. Cette disposition est favorable aux familles, car elle leur permet de ne pas avoir à supporter l’avance de tout ou partie des frais funéraires durant la période séparant le décès du règlement de la succession.
Par ailleurs, toute personne pensant être bénéficiaire d’un contrat obsèques peut désormais saisir l’Association pour la Gestion des Informations sur le Risque en Assurance (AGIRA), qui se charge d’organiser la recherche de contrats d’assurance-vie en cas de décès, selon les dispositions prévues par la loi. Les sociétés d’assurance se sont par ailleurs engagées à répondre dans les plus brefs délais sur l’existence d’un contrat obsèques, en indiquant l’ensemble des pièces nécessaires au règlement de la prestation, et à sensibiliser le souscripteur ou l’adhérent sur l’intérêt d’informer les proches de l’existence d’un contrat obsèques au moment de la souscription et régulièrement tout au long de la vie du contrat.
En tout état de cause, le service des obsèques est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes. Il est alors à la charge des communes (art. L. 2223-27 du CGCT). Enfin, et toujours dans le but d’améliorer l’information des familles, la DGCCRF a édité une brochure téléchargeable sur le site www.economie.gouv.fr/dgccrf. C’est dans ces directions que l’action du Gouvernement s’est orientée en priorité ; une mesure de baisse du taux de TVA, aux effets incertains sur les prix mais au coût budgétaire avéré, n’est donc pas envisagée.
Source : Journal de l’Assemblée nationale
Résonance n°129 - Avril 2017
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