Cette petite entreprise de la périphérie de Belfort, dirigée par Claire Sarazin, a su se frayer un chemin depuis 10 ans dans le paysage thanatopraxique de l'Est de la France.
Claire Sarazin,
thanatopracteur.
Claire, après une courte carrière de gardien de cimetière à la fin des années 90, a passé son diplôme de thanatopracteur avant de rentrer dans les pompes funèbres. Elle raconte: "J'étais curieuse de tout et je cherchais ma voie. Un jour, un employé des PFG est venu me chercher au cimetière pour m'emmener assister à un soin. J'ai rencontré pour la première fois un thanatopracteur, c'était Frédéric Balzinger. Ce jour-là, j'ignorais que nous allions travailler dans le même secteur pendant plus de 10 ans. Il m'a montré mon premier soin et même si nous avons eu quelques chamailleries de concurrents par la suite, son décès il y a 3 ans m'a énormément peinée. J'avais du respect et de l'amitié pour lui. Il nous manque, ça ne sera plus jamais pareil maintenant".
Claire décide alors de se lancer dans la formation de thanatopracteur et intègre l'école de Lyon, qui était à l'époque dirigée par le Pr Morin. Reste à trouver un maître de stage. La tâche s'avère compliquée et la seule entreprise de la région refuse de la former. "Et puis un matin, des pompes funèbres du département voisin sont venues faire une inhumation dans mon cimetière et j'ai fait une rencontre qui a changé le cours de ma vie. Phillippe Bertin, le dirigeant de l'entreprise du même nom, thanatopracteur lui aussi, m'a tendu la main et m'a prise comme stagiaire, puis comme employée par la suite. 15 ans plus tard, je continue à travailler pour les pompes funèbres Bertin, comme sous-traitante".
Malgré le temps qui passe et le chemin parcouru, Claire n'oublie pas d'où elle vient, ni ceux à qui elle est redevable". Nous étions deux thanatopracteurs dans l'entreprise. Jacques, mon collègue, a été aussi mon maître de stage. Il est décédé en 2011 et par l'ironie du hasard, c'est moi qui me suis occupée de lui. C'est la première fois que je faisais un soin en pleurant du début à la fin. J'avais l'impression de l'entendre m'expliquer ce que je devais faire. Encore une page qui s'est tournée".
Après plusieurs années comme thanatopracteur polyvalente dans l'entreprise, Claire abandonne temporairement la thanatopraxie pour devenir assistante funéraire aux Pompes Funèbres Hoffarth : "Une expérience très enrichissante, j'ai découvert le crématorium et surtout le contact avec les familles. Mais la thanatopraxie me manquait trop et comme aucune entreprise n'embauchait, j'ai pris la décision de m'installer à mon propre compte. C'était en 2003, juste après la canicule".
À cette époque, il y avait encore peu de femmes dans la profession et les choses n'ont pas été faciles, dans un secteur où une seule entreprise avait quasiment un monopole. Son parcours témoigne qu'elle croit en son métier et à ce qu'il peut apporter aux familles en deuil. Munie de ses deux valises et avec sa voix douce et rassurante, elle est devenue rapidement une professionnelle appréciée. Cherchant toujours à s'améliorer, elle a su apprendre de nouvelles techniques telles que l'injection par gravité.
"En 2006, après 3 ans sans même un dimanche de repos, j'ai décidé de prendre quelques jours de vacances et le remplaçant que j'ai fait venir chez moi était un adepte de la gravité : José Ruel. Il m'a enseigné cette technique et la philosophie qui l'accompagne. Je peux dire qu'il y a un avant et un après José". À présent, Claire transmet à son tour ce qu'elle a appris à d'autres thanatopracteurs.
Très investie dans la profession depuis des années, elle fut membre du Jury national pendant trois ans et a combattu très activement la réforme du diplôme en 2008. "L'idée de remplacer l'examen pratique par un simple oral a été abandonnée et c'est une grande victoire pour l'Association des Thanatopracteurs de France (ATF), qui a été créée à cette occasion et au delà de ça, pour toute la profession".
Devenue depuis porte-parole de l'ATF, elle s'est également lancée dans la formation depuis cinq ans, d'abord au sein de l'IFFPF pour lequel elle sillonne la France pour expliquer la thanatopraxie aux stagiaires pompes funèbres de niveaux 4 à 6, auprès du personnel soignant dans les IFSI, puis dans sa propre école de thanatopraxie, le centre de formation "Thanatopraxie Art et Technique", ouverte en 2011 avec son associé Frédéric Vuillemez dans la région Est qui en était dépourvue.
En tant qu'enseignante et directrice pédagogique du centre, ce qui lui tient à cœur est que ses élèves réussissent dans le métier avec humanité. Elle est aujourd'hui très sollicitée pour des formations. Sa passion pour la thanatopraxie la conduit même à donner des conférences sur l'histoire de l'embaumement à travers les âges, des premiers rites funéraires à l'arrivée de la thanatopraxie en France dans les années 60, en passant par les momies précolombiennes et égyptiennes, la mercurisation, la plastination et surtout les sokushinbutsus, ces moines japonais qui s'embaumaient de leur vivant et qui la fascinent.
Passionnée d'histoire médiévale et de cinéma fantastique dans la vie, elle est fidèle chaque année au festival de Gerardmer. Cette authentique belfortaine, née dans la cité du lion consacre son peu de temps libre à restaurer la maison qu'elle a achetée en Touraine et embarque pour Ajaccio où elle part se ressourcer dans l'appartement familial dès qu'elle en a l'occasion. Son projet pour l'avenir : Acheter un bateau. "J'ai passé mes permis en 2007, j'ai acheté un gros 4x4 pour tirer mon bateau, mais pour l'instant il ne tire que des remorques de gravats en Touraine. Il faut que je pense sérieusement à en chercher un".
Claire Sarazin est un thanatopracteur très complet, qui a su se faire une place dans la profession. Elle donne toute son énergie, sa gentillesse et sa disponibilité aux gens qu'elle rencontre et aux familles. Après un cancer affronté avec dignité, elle continue sa route entourée de sa famille et de ses amis.
N'hésitez pas un jour à l'appeler juste pour entendre "la belfortaine de thanatopraxie bonjour", vous verrez, vous resterez des heures à parler avec elle.
Sébastien Boukhalo
Thanatopracteur.
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