Concessions funéraires et caveaux
La construction des caveaux est un droit reconnu aux concessionnaires ou à ses héritiers. Que choisir : les caveaux proposés par les communes ou ceux proposés par des entreprises ? La concession funéraire existe depuis l’Ordonnance royale du 6 décembre 1843 qui, en son article 3, prescrivait : "Les concessions de terrains dans les cimetières communaux pour la fondation de sépultures privées seront à l’avenir divisées en trois classes :
1) Les concessions perpétuelles,
2) Les concessions trentenaires,
3) Les concessions temporaires de 15 ans au plus.
Cette ordonnance avait mis fin à un long traumatisme issu des dispositions du décret-loi du 23 prairial an XII qui, inspiré par les dogmes révolutionnaires, dont l’égalité, avait instauré un régime juridique identique pour toutes les sépultures établies dans les cimetières communaux, la sépulture gratuite en service ordinaire ou terrain commun, pour une durée de cinq ans au-delà de laquelle la commune disposait du pouvoir intangible de reprendre les emplacements afin de les consacrer à de nouvelles inhumations. Ce décret-loi imposait donc que, pour un cimetière, la superficie des terrains devait être au moins cinq fois plus étendue que l’espace nécessaire pour y déposer le nombre présumé des morts qui peuvent y être enterrés durant une année, afin de permettre les rotations quinquennales.
Les préoccupations des Français au XIXe siècle étaient de retrouver la possibilité de fonder dans les cimetières entrés dans le giron de la législation nationale, des sépultures familiales pérennes, car, au XVIIIe siècle, les associations cultuelles régnaient en maître pour créer et gérer des espaces sépulcraux, dans un but lucratif, même si les indigents devinrent au XXe siècle des "personnes dépourvues de revenus suffisants", auxquelles la sépulture en pleine terre était normalement dévolue. Pour MM. André Autran et Jean-Pierre Tricon, dans leur ouvrage "La commune, l’aménagement et la gestion des cimetières", "le caveau de famille est devenu une véritable institution dans la mesure où il permet, post-mortem, de réunir tous les membres d’une famille et ce pour l’éternité, sans distinction de croyances, ni de fortune".
C’est dans un tel contexte que l’Ordonnance royale citée a donné naissance aux dispositions législatives actuelles relatives à la définition de la concession funéraire, telle qu’elle résulte de l’article L. 2223-13 du Code Général des Collectivités Territoriales. La construction d’un caveau sur une concession funéraire est un droit reconnu aux bénéficiaires de la concession, ainsi que la pose de monuments et tombeaux. De ce fait, un marché s’est ouvert, qui est demeuré longtemps dans le domaine des entreprises de travaux de marbrerie ou d’opérateurs funéraires polyvalents, dont les entreprises de pompes funèbres, qui peuvent, au titre de leurs activités connexes, proposer aux familles la vente de caveaux et des travaux de marbrerie.
Les concessions funéraires constituent un mode d’occupation du domaine public communal qui n’est pas exposé aux contraintes des occupations du domaine, précaires et révocables et elles n’ouvrent pas aux concessionnaires ou aux héritiers un droit de propriété (le domaine public est inaliénable et imprescriptible). Par contre, le caveau, généralement enfoui partiellement ou totalement dans le sol, constitue une propriété de la famille du concessionnaire.
Il est donc possible de considérer que la propriété du dessous ne l’emporte pas sur la propriété du dessus, tout autant que les règles d’ordre public protégeant la concession (obligation de renouvellement pour les concessions à durée déterminée), ou d’entretien pour les concessions perpétuelles, seraient respectées, car, dans le cas contraire, la commune est en mesure de se réapproprier ces emplacements.
Les communes ont lancé des marchés pour la construction des caveaux afin de maîtriser l’ordonnancement du cimetière, et de garantir la qualité des ouvrages durables et étanches en généralisant le caveau "monobloc". Les concessionnaires bénéficient de garanties sérieuses en matière de qualité des ouvrages confortées par la garantie décennale due par les constructeurs et maîtres d’ouvrage publics, dont la solvabilité ne pouvait être contestée.
Demeure, certes, la faculté de confier ces travaux à un entrepreneur privé, mais la commune est en mesure, par la truchement du règlement des cimetières, d’imposer des règles protectrices, portant notamment sur l’étanchéité des caveaux, car ce problème récurrent a fait l’objet de nombreux conflits. Nous aurons l’occasion de développer plus amplement cette thématique dans le cadre des articles de nos juristes, mais, devant les nombreuses interpellations qui nous parviennent, il m’est apparu nécessaire de rappeler ces quelques règles et principes de base.
Maud Batut
Rédactrice en chef
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