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Après des études d’anglais dans sa ville natale de Bordeaux et en Grande-Bretagne, complétées par une formation supérieure au monde de l’entreprise de la CCIP (Advancia), Anne Tourres a intégré début 1974 le Comité Français des Expositions où elle s’est formée à tous les aspects du métier d’organisateur de manifestations et salons professionnels avant de contribuer, en 1987, à l’organisation du premier salon professionnel dédié au secteur industriel funéraire. Depuis peu à la retraite, elle a bien voulu revenir, pour les lecteurs de Résonance, sur certaines des étapes les plus marquantes de sa carrière… rencontre !


Résonance : Anne, votre nom est indissociable de FUNÉRAIRE PARIS, et pour cause, avec Guy Dussaux, Marc Manzini et Bernard Laguens, vous êtes à l’origine de sa création en 1987. Quels étaient les enjeux et motivations de cette création et quel y a été votre rôle ?

Anne Tourres : Pour concrétiser le projet de création du premier salon funéraire en 1987, la CSNAF (Chambre Syndicale Nationale de l’Art Funéraire), présidée à l’époque par Guy Dussaux, avait trouvé l’appui de plusieurs organisations professionnelles : la Fédération du Granit, la Fédération Nationale de la Marbrerie Funéraire, la CAPEB et la revue Le Mausolée.

Après de nombreuses réunions, seule la CSNAF a décidé de franchir le pas et pris le pari de se lancer dans l’organisation du salon. Pour sa réalisation, elle a fait confiance au Comité Français des Expositions (CFE) dirigé par Bernard Laguens où j’avais travaillé depuis mes débuts professionnels et étais en charge des nouvelles activités. Le CFE avait bien voulu accepter de prendre le risque financier au cas où la tenue de ce premier salon n’aurait pas été concluante. Mais cette première édition fut un magnifique succès : 238 exposants, 6 000 visiteurs.

Petite anecdote : l’accès visiteurs n’ayant pas été prévu assez grand, des files d’attente atteignaient jusqu’à 2 heures de queue, des cars entiers débarquaient des visiteurs de tous pays si bien que dans la nuit du premier jour d’ouverture du salon, il a fallu "casser" l’accueil pour l’agrandir.

Mon rôle a été de construire ex nihilo le salon Funéraire : constituer un fichier d’exposants potentiels, prospecter ces sociétés et les convaincre de participer au salon, assurer la répartition des stands, réaliser un fichier visiteurs, assurer la promotion du salon…

Immense satisfaction à l’issue de cette première édition : jamais tous les métiers du funéraire n’avaient pu - à ce point - se rassembler, se concerter, se comparer, s’exprimer, montrer leur existence, leur dynamisme. Le but initial qui était la promotion des métiers du funéraire et la reconnaissance de la profession était largement atteint. D’où la grande fierté pour les initiateurs de ce fabuleux projet qu’étaient Guy Dussaux, Marc Manzini, François Bouis… et pour moi-même évidemment.

R : C’est à la suite de cette première édition de FUNÉRAIRE PARIS que vous avez décidé de vous consacrer pleinement à la filière industrielle funéraire… Pourquoi cette décision ?

AT : Non, ce n’est pas exactement ça ! J’étais responsable de l’organisation de plusieurs autres salons professionnels et je souhaitais continuer dans cette voie que j’aimais tout particulièrement. J’avais notamment créé le Salon de la vie collective, Interkit (le salon des meubles en kit et du prêt-à-emporter pour l’habitat), K-design à New York et organisé la participation française à l’AIFF (American International Furniture Fair) à Dallas.

Après la tenue du premier salon funéraire en 1987, Guy Dussaux et Marc Manzini ont souhaité que j’assure également la gestion de la Chambre Syndicale et en ont fait la demande à mon directeur. C’est ainsi que j’ai cumulé, à mon grand bonheur tant j’avais rencontré à cette occasion de gens attachants et sympathiques, l’organisation du salon et le fonctionnement de la CSNAF, jouant en quelque sorte à la fois le rôle de maître d’ouvrage et de maître d’œuvre.

Suite à une réorganisation au sein du CFE, j’ai rejoint sa filiale opérationnelle et commerciale France Conventions en tant que chef de projets et membre du directoire. Outre mes activités "funéraires", j’y étais responsable de Losangexpo, salon annuel des buralistes et de la Biennale des éditeurs de la décoration. J’organisais également différents congrès et conventions, notamment le Symposium des Pionniers/Enjeux-Les Échos qui m’a donné le privilège de travailler en étroite liaison avec de nombreuses personnalités du monde politique, des médias, des entreprises.

Puis, une fois arrivé l’âge légal de la retraite, la CSNAF m’a demandé si je pouvais poursuivre mes activités à son profit en tant qu’autoentrepreneur, ce que j’ai accepté volontiers.

R : En 36 ans de FUNÉRAIRE PARIS, vous avez bénéficié d’une position privilégiée pour observer les diverses mutations du secteur funéraire. Qu’est-ce qui, selon vous a le plus évolué, et pourquoi ?

AT : Tout d’abord, alors que le monde des salons a lui-même profondément évolué sous la pression de la concurrence due aux médias qui ont eu tendance à substituer des salons "distanciels" à des salons "présentiels", il est heureux de constater que FUNÉRAIRE PARIS n’a pas subi ce type d’érosion, preuve supplémentaire qu’il répond toujours à un besoin. Les regroupements des entreprises du secteur n’ont pas non plus fondamentalement impacté le salon, ni en volume ni en qualité. Les stands sont plus vastes et les exposants font de plus en plus d’efforts pour les rendre attrayants.

Au niveau des fabricants et fournisseurs du funéraire, je soulignerais leur adaptation aux demandes évolutives des familles endeuillées, à des rites toujours plus différenciés et personnalisés. Leur créativité, leur inventivité, leur souci du made in France et leur recherche esthétique forcent l’admiration. Le développement de la crémation, par exemple, a conduit à des évolutions très variées dans le produit urne.

L’utilisation de l’informatique et de systèmes de conception assistée par ordinateur a permis de réduire certains délais de fabrication de façon drastique permettant ainsi d’offrir des produits personnalisés à la demande presque aussi rapidement que s’ils étaient sur étagère. Pour résumer, j’aurais envie de pasticher la belle expression d’André Malraux inaugurant l’exposition Toutankhamon de 1967 et je dirais : "l’art funéraire français devient de moins en moins funèbre".

R : Anne, vous avez tant fait pour les fournisseurs de la branche, si vous aviez trois temps forts ou réalisations à retenir, quels seraient-ils ?

AT : Je dirais la réalisation régulière des études menées en partenariat avec le CRÉDOC(1), notamment "Les Français et les obsèques", baromètre sur l’évolution des comportements des Français vis-à-vis du funéraire. L’organisation et la tenue des premières Assises du Funéraire sur le vécu du deuil ; puis dans la continuité les premières Assises du Deuil en collaboration avec nos amis d’Empreintes-Vivre son deuil. Plus récemment, la réalisation du livre "Les Métiers de l’Art Funéraire en France", véritable livre d’art à la gloire de l’industrie funéraire française.

R : En 2024 sonne pour vous l’heure de la retraite, cela étant, on sait la femme active que vous êtes. Avez-vous des projets particuliers ou allez-vous vraiment prendre du temps pour vous après toutes ces années dédiées au funéraire ?

AT : Après un demi-siècle d’activité professionnelle, j’aimerais prendre du temps pour moi et ma famille et voyager un peu. Mais je vous avouerai que j’ai du mal pour l’instant à me dégager du funéraire : j’ai trop vécu pour et avec lui depuis presque quarante années !

R : Merci Anne pour cet échange et… aura-t-on le plaisir de vous croiser en tant que visiteuse dans les allées de FUNÉRAIRE PARIS 2025 ?

AT : Pourquoi pas ?

Nota :
(1) Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie.

Steve La Richarderie

Résonance n° 203 - Mai 2024

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations