Votre panier

Panier vide
Voici une intéressante réponse ministérielle relative à la possibilité que cela soit le maire et non le conseil municipal qui détermine le montant des tarifs des concessions funéraires. Nous pensons qu’elle mérite quelques commentaires….


Réponse ministérielle, n° 954, JO, AN, 11 février 2025

La délégation de la fixation du tarif des concessions au maire est possible

On le sait, l’art. L. 2223-15 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) dispose que : "Les concessions sont accordées moyennant le versement d’un capital dont le montant est fixé par le conseil municipal". Ainsi, littéralement, l’autorité compétente pour fixer ce montant est le conseil municipal.

Néanmoins, le gouvernement relève que l’art. L.2122-22 du CGCT relatif aux délégations de pouvoir que le maire peut se voir consentir par le conseil municipal énonce en son 2° que le maire peut être chargé par le conseil municipal : "De fixer, dans les limites déterminées par le conseil municipal, les tarifs des droits de voirie, de stationnement, de dépôt temporaire sur les voies et autres lieux publics et, d’une manière générale, des droits prévus au profit de la commune qui n’ont pas un caractère fiscal, ces droits et tarifs pouvant, le cas échéant, faire l’objet de modulations résultant de l’utilisation de procédures dématérialisées".

La question se pose alors de la nature juridique de ce "montant". Fort logiquement, le Gouvernement prend alors le soin de relever que : "les recettes fiscales de la commune sont limitativement définies par l’art. L. 2331-3 du CGCT, qui ne mentionne pas les recettes perçues en contrepartie de la délivrance de concessions funéraires".

En outre, l’art. L. 2331-2 du CGCT définissant les catégories de recettes non fiscales vise, au 4° : "Le produit des terrains communaux affectés aux inhumations et la part revenant aux communes dans le prix des concessions des cimetières". Compte tenu de ces éléments, il apparaît que le maire peut recevoir délégation de la part du conseil municipal afin d’exercer la compétence d’établissement du tarif des concessions funéraires.

Par exemple, le juge a déjà accepté, par le passé, que le conseil municipal, sur la base de l’art. L. 2122-22-2° du CGCT, puisse déléguer au maire le pouvoir de fixer les tarifs d’inscription à un conservatoire municipal de musique (CE 25 févr. 1998, Cne de Colombes, n° 157347).

Ainsi, le maire pourrait se voir attribuer la possibilité de fixer le montant des tarifs des concessions funéraires en lieu et place du conseil municipal. Néanmoins, il nous paraît utile d’attirer l’attention sur les conséquences d’une telle possibilité.

Les points de vigilance

À côté des délégations de signature et distinctes des hypothèses où le conseil municipal autorise le maire à signer des actes sur le fondement d’une délibération, se trouve une liste hétéroclite de matières où le conseil municipal peut décider de se départir de ses compétences au profit du maire, essentiellement pour des raisons de rapidité de prise de la décision.

En général, tout ou partie de ces attributions lui sont déléguées peu après sa prise de fonction et à chaque nouveau mandat. Elles sont modifiables ou révocables par le conseil à tout moment.

Les conditions générales de la délégation : la perte de compétence du conseil

L’art. L. 2122-22 du CGCT dispose tout d’abord que : "Le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat […]". Ainsi, littéralement, il peut être précisé que ces matières déléguées le sont pour la durée de son mandat. A priori, il appartiendra donc au conseil, s’il désire rapporter tout ou partie de ces attributions, de délibérer de nouveau afin que le maire voie ses compétences lui être retirées. (CE 2 mars 2011, Commune de Bretignolles-sur-Mer, req. n° 315880).

Il est très important de mentionner qu’à compter du moment où une matière est déléguée par le conseil, celui-ci n’en dispose plus (CE 21 janvier 1983, Association "Maison des jeunes et de la culture de Saint-Maur", Lebon 14). Par exemple, dans le cas qui nous intéresse, dire que le maire peut fixer le tarif des concessions, c’est déposséder le conseil de cette possibilité.

À compter de l’intervention de cette délégation, le conseil municipal ne disposera plus de ce pouvoir et, s’il advenait qu’il prenne une telle décision, celle-ci serait illégale et donc annulable par le juge. Il faudrait donc tout d’abord retirer la délégation donnée au maire (par une délibération du conseil abrogeant celle-ci) sur ce point pour que le conseil municipal puisse ensuite intervenir de nouveau…

L’hypothèse de la subdélégation

On remarque également que la liste des matières énumérées à l’art. L. 2122-22 du CGCT peut faire l’objet de subdélégations : "Sauf disposition contraire dans la délibération portant délégation, les décisions prises en application de celle-ci peuvent être signées par un adjoint ou un conseiller municipal agissant par délégation du maire dans les conditions fixées à l’art. L. 2122-18. Sauf disposition contraire dans la délibération, les décisions relatives aux matières ayant fait l’objet de la délégation sont prises, en cas d’empêchement du maire, par le conseil municipal" (L. 2122-23 du CGCT).

En effet, l’art. L. 2122-18 du CGCT dispose alors que : "Le maire est seul chargé de l’administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l’absence ou en cas d’empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d’une délégation à des membres du conseil municipal".

Ainsi, le maire, dans le silence de la délibération du conseil municipal, pourra subdéléguer aux élus (mais pas aux fonctionnaires). Il s’agit donc ici d’une délégation de fonction et non d’une délégation de signature prévue pour certains fonctionnaires à l’art. L. 2122-19 du CGCT. En revanche, si le conseil le désire, il pourra interdire toute délégation aux élus de ses pouvoirs délégués aux maires. Ainsi, sur le principe, ce tarif pourrait être fixé par un élu ayant reçu du maire cette délégation.

Il faut alors bien comprendre que l’art. L. 2122-18 du CGCT régit tant les matières déléguées au maire par le conseil municipal que celles appartenant en propre au maire et déléguées par lui aux élus. Enfin, derechef, il est important de souligner qu’il importe de ne pas confondre ces délégations avec les hypothèses où le maire est habilité par délibération du conseil municipal à prendre les mesures d’exécution des délibérations.

Les matières déléguées : l’impossibilité d’une délégation inconditionnelle

Il convient de garder à l’esprit qu’une délégation est toujours de lecture stricte et ne saurait être extrapolée. Il faut également attirer l’attention sur le fait que certaines de ces délégations nécessitent que le conseil municipal en précise l’étendue. Par exemple, et toujours dans cette hypothèse où la fixation du tarif des concessions serait déléguée au maire, on peut constater que la rédaction de l’art. L. 2122-22-2° du CGCT est : "de fixer, dans les limites déterminées par le conseil municipal, les tarifs des droits de voirie, de stationnement, de dépôt temporaire sur les voies et autres lieux publics et, d’une manière générale, des droits prévus au profit de la commune qui n’ont pas un caractère fiscal, ces droits et tarifs pouvant, le cas échéant, faire l’objet de modulations résultant de l’utilisation de procédures dématérialisées".

Cette délégation implique donc nécessairement que, dans la délibération accordant cette possibilité, le conseil municipal fixe pour chacune des catégories de tarifs des limites au-dessus desquelles il retrouvera sa compétence. C’est là le sens du membre de phrase "dans les limites déterminées par le conseil municipal".

Par exemple, la jurisprudence nous explique que, lorsque le conseil municipal a donné cette délégation, mais sans fixer aucune limite à l’intérieur desquelles pouvaient être fixés les divers tarifs, notamment celui des frais de photocopie, cette délégation n’est pas valable puisqu’elle contrevient à la disposition de ce 2° selon laquelle les tarifs ne peuvent être fixés par le maire que "dans les limites déterminées par le conseil municipal" ; en conséquence, la décision du maire fixant un tel tarif est illégale, alors même que, s’agissant des frais de photocopie, le tarif fixé à 1 F n’est manifestement pas erroné (TA Lyon 22 novembre 2000, Borel, D. 2001. 979).

Pour une application à notre cas, il serait possible que le conseil municipal prévoie qu’il ne confiera pas ce droit de fixer le prix des concessions, ou bien qu’il ne le déléguera que dans un cadre tarifaire précis ; il sera également possible qu’il détermine une fourchette de prix quelle que soit la matière concernée (pas seulement les concessions, mais également d’autres tarifs) au-delà de laquelle il redevient compétent. Il conviendra donc que, sur le sujet plus global de ces tarifs, le conseil municipal se montre précis ou, en tout cas, pour reprendre la formulation de l’article, qu’il détermine des limites…

La surveillance du conseil sur le maire

Le maire doit en effet "rendre compte à chacune des réunions obligatoires du conseil municipal" (art. L. 2122-23, al. 3). Compte tenu des dispositions de l’art. L. 2121-7 du CGCT, le maire doit donc rendre compte au moins une fois par trimestre au conseil municipal. Ainsi, lorsqu’il fixera le montant des tarifs, il en communiquera la grille tarifaire au conseil municipal qui suit.

Il est à noter que cette obligation de rendre compte ne fait l’objet d’aucune sanction prévue par les textes. L’information donnée par le maire peut consister :
- en un rapport oral fait en début de séance,
- en la remise d’une liste des décisions qu’il a prises en vertu de la délégation qui lui a été confiée.

Enfin, les dispositions de l’art. L. 2122-23 du CGCT selon lesquelles : "Les décisions prises par le maire en vertu de l’art. L. 2122-22 sont soumises aux mêmes règles que celles qui sont applicables aux délibérations des conseils municipaux portant sur les mêmes objets", impliquent nécessairement qu’à l’instar des délibérations, ces décisions du maire soient transmises au contrôle de légalité. Ce tarif devra donc, à l’égal de la délibération le prévoyant, être transmis au contrôle de légalité et faire l’objet des autres mesures de publicité appropriées.
 
Philippe Dupuis
Consultant au Cridon - Chargé de cours à l’université de Lille

Résonance n° 213 - Mars 2025

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations